Vous souhaitez monter un projet européen en tant que coordinateur. Bravo, vous avez du courage ! Avez-vous réfléchi aux critères pour trouver LA personne qui va pouvoir gérer tout ça ? Etre coordinateur de projet européen ou transfrontalier, c’est en effet être un mouton à 5 pattes…. J’espère que cet article vous aidera à mettre vos besoins au clair afin de recruter la personne adéquate – ou déléguer certaines missions à des consultants éventuellement. Ces conseils sont bien sûr valables pour des consortia de toute taille et pour tous les programmes !
Le coordinateur de projet doit en effet maitriser les règles d’animation d’un groupe, avec tout ce que cela implique en matière de différences dans les attentes vis-à-vis du projet, le niveau d’implication des différents partenaires, etc.
Il devra savoir s’imposer avec douceur et mener le projet « d’une main de fer dans un gant de velours » pour arriver à faire avancer les choses dans les délais imposés, face aux retards des uns, au silence des autres malgré de multiples relances, … Il devra savoir expliquer la même chose de plusieurs façons, parfois à plusieurs interlocuteurs différents dans la même structure.
S’agissant d’un projet européen, le/la coordinateur (trice) doit aussi savoir gérer les différences culturelles, par exemple en matière d’animation de réunions. Ainsi, si les déjeuners ou les pauses café font partie intégrante de la journée de travail pour les Français, qui règlent parfois de vrais problèmes dans ces moments-là, ce n’est pas toujours compris ainsi dans les autres cultures qui peuvent les considérer comme une « perte de temps » (je cite ici une partenaire allemande qui se reconnaîtra peut-être…).
Toujours sur ce thème, le porteur d’un projet transfrontalier (ou européen) doit savoir tenir compte des différences d’organisation interne de ses partenaires : quel est la procédure de validation des documents chez chacun, quel est le délai ? Quelles sont les conséquences sur la bonne mise en œuvre du projet ? Est-il possible de contourner ces règles ou pas du tout ? Par exemple, si vous êtes une collectivité locale française, il peut être utile d’expliquer à vos partenaires européens que vous ne pouvez pas, en principe, faire signer de document engageant la collectivité avant un vote en instance délibérative (conseil municipal, commission permanente, …) – et qu’il faut donc disposer de ce document très tôt, en fonction de vos délais internes de validation (dans certaines collectivités, cela peut nécessiter 3 ou 4 mois). Inversement, cela peut valoir la peine de savoir que dans telle collectivité étrangère, la signature de l’équivalent du DGS vaut engagement et que vous n’avez pas besoin d’attendre un vote formel en conseil délibérant.
Deuxièmement – et cela pourrait même être la première condition –le (ou la) coordinateur(trice) doit aussi connaître les modalités de gestion des fonds européens dans son programme : règles d’éligibilité des dépenses, règles des marchés publics, règles concernant les pièces justificatives de dépenses acceptées – au niveau du programme, voire dans les différents pays concernés.
Il ou elle doit également connaître les procédures du programme, telles que les règles de présentation des demandes de paiement et des rapports d’exécution (format, délai, …). Par exemple, il ou elle doit maîtriser le logiciel de saisie en ligne qui est désormais monnaie courante dans de nombreux programmes (Synergie-CTE pour les programmes INTERREG gérés par des structures françaises).
S’agissant de fonds européens, il doit maîtriser les règles d’encadrement des marchés publics de votre pays – et ce, même si vous pensez que vous n’y êtes pas soumis. En effet, tout bénéficiaire de fonds européens, même une structure privée, doit en principe appliquer les règles de la commande publique (afin de garantir une vraie concurrence et donc une bonne gestion des fonds publics – je n’émets pas d’opinion personnelle sur le bien-fondé de cette règle, je la rappelle juste…).
Troisième point, tout aussi important : Il doit être parfaitement bilingue, si vous menez un projet transfrontalier, ou maîtriser l’anglais, si vous êtes sur un programme européen – et bien sûr, à l’oral comme à l’écrit.
Si en plus il ou elle sait faire des traductions, voire de l’interprétation simultanée, c’est « bonus » : pas besoin de faire appel à un prestataire externe pour les traductions de documents ou les réunions ! C’est pourtant un vrai métier que de savoir interpréter ce que quelqu’un d’autre a écrit ou dit, mais il n’y a pas de petites économies, n’est-ce pas ? (vous comprendrez en me lisant que je suis d’accord avec le dicton « chacun son métier » !)
Dans tous les cas, même en français, il ou elle doit savoir rédiger correctement, aussi bien des textes longs (les rapports pour vos élus par exemple) que des textes courts (un résumé du projet pour votre site Web par exemple).
Quatrième point, votre coordinateur doit avoir des capacités managériales, car vous aurez certainement recours à des stagiaires, des consultants (par exemple pour le contrôle des dépenses), voire, si vous avez le budget, à une vraie équipe de gestion du projet.
Il doit aussi être très diplomate et convaincant, vis-à-vis des partenaires du projet, des instances du programme, mais aussi vis-à-vis des compétences internes de votre organisation, dont il aura besoin pour mener à bien le projet : secrétariat, service informatique, finances, service intérieur pour les réunions, communication, etc.
Le projet européen sera toujours vu comme une mission supplémentaire qui s’impose à ces personnes, alors votre coordinateur devra bien connaître les rouages internes : à qui s’adresser pour avoir ce dont il a besoin ? Par exemple, comment faire signer rapidement un document urgent ? Pour l’avoir vécu, le fait de pouvoir toquer à la porte de son DGS à 15h30, pour faire signer un document qui doit partir au Chronopost de 16h, est extrêmement confortable… Mais cela implique de savoir comment faire (connaître la secrétaire à qui on peut s’adresser et qui ne fera pas barrage, par exemple).
De ce point de vue, recruter un junior juste pour le projet n’est pas forcément une bonne affaire (en dehors de l’aspect financier).
Concernant la communication, idéalement votre coordinateur devrait maîtriser les réseaux sociaux, la gestion d’un site Web multilingue, d’un Extranet réservé aux partenaires du projet (voire leur création), sans compter les relations avec la presse locale… S’il sait en plus utiliser les logiciels de mise en page pour les documents à imprimer, c’est encore mieux. Et s’il a des notions de graphisme (quelles sont les polices à utiliser, comment utiliser les photos, …), ça facilitera la communication sur le projet.
Enfin, il ou elle doit maitriser les méthodes de gestion de projet : rétro-planning, définition des priorités, suivi des actions engagées, etc. Il doit avoir des notions d’évaluation des politiques publiques afin de pouvoir choisir, au démarrage du projet, les bons indicateurs, puis les suivre et les renseigner au fur et à mesure de l’avancement du projet.
Voilà ce qui devrait figurer dans la fiche de poste de votre coordinateur de projet. Ah j’oubliais, comme votre budget est serré, il faut que la personne ne vous coûte pas trop cher. Et puis aussi, comme vous êtes sur un projet européen avec une date de fin, il ou elle doit accepter un CDD…
Voilà tous les sujets que doivent maîtriser les coordinateurs de projets européens. Pour ma part, je connais des personnes qui ont beaucoup de qualités, mais aucune qui ait toutes celles-là… Et si vous avez trouvé une telle perle, surtout, gardez-la ! Sinon, avez-vous pensé à déléguer certains missions à un consultant (par ex. sur le suivi des dépenses ou encore l’animation du consortium) ?
Qu’en pensez-vous ? Cela vous paraît-il réaliste ? Ou exagéré ? Donnez-moi votre avis dans les commentaires !